dimanche 21 avril 2024

L'Ange Dada

Heurs et malheurs d’Emmy Hennings créatrice du cabaret Voltaire.

Qui est Emmy Hennings ? Fernando Gonzalez Viñas et José Lazaro se proposent de rendre justice à cette autrice allemande, figure oubliée du dadaïsme. Des extraits de ses textes et un gros travail documentaire sur la vie de cette dernière replacent Emmy Hennings au sein de son époque sur fond d’histoire mondiale, alors que sa vie lui fait croiser nombre de figures célèbres de cette période. 

Épouse d’Hugo Ball, elle sera amie avec Herman Hesse qui signera la préface d’un de ses textes. Ce dernier avouera avoir été surpris par son talent à la lecture de Prisons, livre tiré de son expérience personnelle. Au fil des pages de l’album, on croise Alfred Kerr, Nathalie Barney, Liane de Pougy, Herman Hesse, Tagore, Lénine, Frank Wedekind, Cocteau, Hans Arp, Tristan Tzara et d’autres personnalités dont certaines ont, comme elle, plus ou moins sombré dans l’oubli. 

© Cambourakis
La bd est servie par un ton cynique, celui qu’adopte très vite la jeune-femme face aux vicissitudes de la vie, ses échecs et ses erreurs. Ses errances à travers l’Allemagne puis l’Europe la conduiront à se prostituer pour survivre, à être incarcérée plusieurs fois.  Bien qu’accro à la morphine, il émane pourtant d’elle une puissance et un charme certain lorsqu’elle chante dans les cabarets. C’est de cette présence surprenante sur scène dont ont témoigné ceux qui l’ont entendue alors que physiquement, elle n’était qu’une frêle jeune-femme blonde, ce qui lui valut le surnom d’ange dada. Le dessin en noir et blanc de José Lazaro est principalement centré sur les visages, laissant ressortir les émotions des personnages de l’album. Femme libre, elle tranche par son parcours avec l’image de l’épouse allemande de la première moitié du XXème siècle. 
 
 Chanteuse de cabaret, elle est avec son compagnon Hugo Ball, une des fondatrices du cabaret Voltaire à Zurich, là où est né le dadaïsme. C’est Tristan Tzara qui a repris à son actif la création de ce mouvement, même si l’origine du mot « dada » est sujet à controverse car au final, ce serait peut-être Emmy qui en serait à l’initiative. Sa vie se déroule, depuis le moment où elle a quitté Flensburg, à la frontière du Danemark, entre Brême, Munster, Cologne, Berlin, Budapest, Paris et la Suisse. 

 
© Cambourakis
La bd se nourrit 
d'allusions à la peinture de ces années-là, laissant apercevoir au détour des cases les œuvres de Picasso, Munch, Klimt ou Marcel Duchamp. Un tableau de Marcel Janco évoquait d’ailleurs les soirées d’avant-garde de ce lieu d’avant-garde où peinture et littérature se rencontraient.
 

 

© archives dada tumblr.com
Traduit de l’espagnol,  l’Ange dada  ressuscite les débuts d’un courant artistique qui a mené à l’art moderne. En donnant la parole à Emmy Hennings, les deux auteurs permettent de faire découvrir un portrait de femme atypique en ce début du XXème siècle tout en révélant la genèse du dadaïsme avec la création du Cabaret voltaire à Zurich avant que Tristan Tzara n’arrive à Paris. 

l'Ange DADA

Heurs et malheurs d'Emmy Hennings

 scénario de Fernando González  Viñas

dessins de José Lázaro

traduit en français par Christilla Vasserot

Editions Cambourakis 

2021