mercredi 17 décembre 2025

Maxton Hall

 

Ruby Bell intègre le luxueux établissement scolaire Maxton Hall après avoir bénéficié d'une bourse d'étude. Elle va enfin pouvoir réaliser son rêve et être admise à l'université d'Oxford. Pourtant, dans cette nouvelle vie, il y a James Beaufort, garçon riche et influent de l'école mais lorsqu'elle découvre un secret le concernant et pouvant détruire la réputation de sa famille, elle va devoir apprendre les codes de son monde. 
 
 
Dès le premier tome de la trilogie Maxton Hall de Mona Kasten, on pense bien évidemment à Gossip Girl et à Harry Potter. L'école ressemble à un gigantesque chateau flanqué de tours et d'ailes dans lequel les nouveaux se perdent, un peu comme à Poudlard. C'est du moins le sentiment de Ruby lorsqu'elle découvre les lieux. 
 

© JULIAN STRATENSCHULTE / DPA / dpa Picture-Alliance via AFP
© JULIAN STRATENSCHULTE / DPA / dpa Picture-Alliance via AFP

La série dont la seconde saison vient d'être diffusée sur Prime Video est tournée au château de Marienburg, situé au sud de Hanovre, un  édifice au style à la fois romantique et gothique. Les élèves viennent d'un milieu fortuné et l'uniforme est de mise. C'est par ce côté-là que Maxton Hall se rapproche de Gossip Girl.
 
 
Le roman répond aux attentes du Young Adult. Les différents lieux décrits font rêver les lectrices qui s'identifient peu ou prou à l'héroïne. Maxton Hall introduit le thème  de la différence de milieux sociaux ainsi que le problème de l'intégration dans un nouvel environnement. Comme la majorité des adolescents dans la littérature Young Adult, les personnages du récit sont confrontés aux institutions contre lesquelles il doivent se battre. 

 

Ruby ne cessera de lutter contre la discrimination dont elle va faire l'objet face aux privilèges des élèves de l'école. Quant à James et sa soeur, c'est à leur père qu'il leur faudra tenir tête. Alistair, un de leurs meilleurs amis, de son côté, est rejeté par sa famille pour avoir fait son coming-out. Mona Kasten en créant ses personnages, met en scène une diversité de personnalités dans lesquels les lecteurs se reconnaissent ce qui lui permet d'évoquer des sujets qui touchent les adolescents. 
 

Paradoxalement, le Young Adult est une catégorie particulière, comme la littérature jeunesse d'ailleurs, dans la mesure où tous les genres y sont représentés, de la romance à la fantaisie en passant par la dystopie. Comme le roman pour ado, la seule obligation que le Young Adult comporte, c'est de ne pas contenir de scènes de sexe explicites. Dans le cas contraire, on parlera de "New Adult" mais on s'adresse alors à des lecteurs de plus de 18 ans car il existe une commission de surveillance et de controle qui surveille les parutions destinées à la jeunesse mais c'est une autre histoire ! Notre romance young ado s'affirme dès les premières pages comme une #ennemiestolovers, un des tropes les plus appréciés du genre. 
© imago/Manfred Segerer | imago/Manfred Segerer
Maxton Hall est devenu un phénomène mondial chez les adolescents et les jeunes adultes suite à sa diffusion en série sur Prime Video, qui a fait connaître le nom de Mona Kasten, autrice d'origine allemande qui vit à Hambourg. 

 


Le Young Adult est né aux Etats-Unis bien que la littérature ait toujours mis en scène des jeunes-gens, que ce soit Augustin dans le Grand Meaulnes ou le héros éponyme des Années d'apprentissage de Wilhelm Meister de Goethe qui marque le début du Bildungsroman ou roman d'apprentissage. Pas étonnant que le thème du roman d'éducation soit si familier à l'autrice, le concept est allemand ! Le personnage de James doit évidemment beaucoup également au Heathcliff d'Emily Brontë et au Darcy de Jane Austen. Comme ses prédécesseurs, ce dernier adopte le comportement d'un héros torturé et les conséquences de ses actes et de ses revirements blessent cruellement Ruby. Plus récemment, James doit également beaucoup à Edward Cullen de la série Twilight, un des premiers succès young adult qui a créé un premier public de lecteurs et lectrices allant de 15 à 30 ans. Le personnage de James a également tout du "bad boy". Ecartelé entre le rôle que son père lui impose et ses aspirations personnelles, son inconstance permet au premier tome de se terminer sur un superbe cliffhanger. 
 
Maxton Hall
de Mona Karsten 
Editions Hachette Romans
2024 
 

 


 

dimanche 21 avril 2024

L'Ange Dada

Heurs et malheurs d’Emmy Hennings créatrice du cabaret Voltaire.

Qui est Emmy Hennings ? Fernando Gonzalez Viñas et José Lazaro se proposent de rendre justice à cette autrice allemande, figure oubliée du dadaïsme. Des extraits de ses textes et un gros travail documentaire sur la vie de cette dernière replacent Emmy Hennings au sein de son époque sur fond d’histoire mondiale, alors que sa vie lui fait croiser nombre de figures célèbres de cette période. 

Épouse d’Hugo Ball, elle sera amie avec Herman Hesse qui signera la préface d’un de ses textes. Ce dernier avouera avoir été surpris par son talent à la lecture de Prisons, livre tiré de son expérience personnelle. Au fil des pages de l’album, on croise Alfred Kerr, Nathalie Barney, Liane de Pougy, Herman Hesse, Tagore, Lénine, Frank Wedekind, Cocteau, Hans Arp, Tristan Tzara et d’autres personnalités dont certaines ont, comme elle, plus ou moins sombré dans l’oubli. 

© Cambourakis
La bd est servie par un ton cynique, celui qu’adopte très vite la jeune-femme face aux vicissitudes de la vie, ses échecs et ses erreurs. Ses errances à travers l’Allemagne puis l’Europe la conduiront à se prostituer pour survivre, à être incarcérée plusieurs fois.  Bien qu’accro à la morphine, il émane pourtant d’elle une puissance et un charme certain lorsqu’elle chante dans les cabarets. C’est de cette présence surprenante sur scène dont ont témoigné ceux qui l’ont entendue alors que physiquement, elle n’était qu’une frêle jeune-femme blonde, ce qui lui valut le surnom d’ange dada. Le dessin en noir et blanc de José Lazaro est principalement centré sur les visages, laissant ressortir les émotions des personnages de l’album. Femme libre, elle tranche par son parcours avec l’image de l’épouse allemande de la première moitié du XXème siècle. 
 
 Chanteuse de cabaret, elle est avec son compagnon Hugo Ball, une des fondatrices du cabaret Voltaire à Zurich, là où est né le dadaïsme. C’est Tristan Tzara qui a repris à son actif la création de ce mouvement, même si l’origine du mot « dada » est sujet à controverse car au final, ce serait peut-être Emmy qui en serait à l’initiative. Sa vie se déroule, depuis le moment où elle a quitté Flensburg, à la frontière du Danemark, entre Brême, Munster, Cologne, Berlin, Budapest, Paris et la Suisse. 

 
© Cambourakis
La bd se nourrit 
d'allusions à la peinture de ces années-là, laissant apercevoir au détour des cases les œuvres de Picasso, Munch, Klimt ou Marcel Duchamp. Un tableau de Marcel Janco évoquait d’ailleurs les soirées d’avant-garde de ce lieu d’avant-garde où peinture et littérature se rencontraient.
 

 

© archives dada tumblr.com
Traduit de l’espagnol,  l’Ange dada  ressuscite les débuts d’un courant artistique qui a mené à l’art moderne. En donnant la parole à Emmy Hennings, les deux auteurs permettent de faire découvrir un portrait de femme atypique en ce début du XXème siècle tout en révélant la genèse du dadaïsme avec la création du Cabaret voltaire à Zurich avant que Tristan Tzara n’arrive à Paris. 

l'Ange DADA

Heurs et malheurs d'Emmy Hennings

 scénario de Fernando González  Viñas

dessins de José Lázaro

traduit en français par Christilla Vasserot

Editions Cambourakis 

2021